lunes, 8 de agosto de 2016

MEXICO: Taxi seguro

TAXI SEGURO

Mexico, juillet 2016

Mario est chauffeur de taxi. Son NISSAN TSURU est garé au sitio situé derrière l'église San Juan Bautista de Coyoacán. Ils sont 45 taxis sur ce site, 30 de jour et 15 de nuit. Depuis que de nombreux clients, en particulier des touristes, se sont faits conduire à leur insu dans des banlieues perdues avant d'être dévalisés par des conducteurs de taxis volés ou leurs complices, il est recommandé de ne pas arrêter un taxi dans la rue. Il vaut mieux aller au sitio le plus proche pour prendre un taxi « sûr » et connaître à l'avance le prix de la course.

Mario conduit de 5 heures du matin à 5 ou 6 heures de l'après-midi. C'est le minimum, dit-il, pour ramener un peu d'argent à la maison. Il faut dire que les tarifs des taxis mexicains n'ont rien de comparable avec les nôtres. Une course de 45 mn pour aller à l'aéroport ne coûte que 160 pesos, soit 8 euros.

Mario préfère conduire le jour, malgré les embouteillages, car la nuit tout peut arriver. Des clients ivres refusaient parfois de lui payer la course, ou disaient qu'ils n'avaient pas d'argent. L'un d'eux lui a même volé un soir son GPS. Depuis, en cas de doute sur la route à suivre, il se sert de son portable.

Sur les grandes voies dites rapides de Mexico, les ejes viales, c'est un peu la loi de la jungle. La priorité est au plus gros, et les véhicules changent de file ou doublent à droite sans mettre le clignotant. Pourtant les accrochages sont peu nombreux, peut-être parce qu'il y a une image de la vierge de Guadalupe dans la plupart des voitures. En réalité, les conducteurs mexicains sont assez calmes, ils klaxonnent peu, et quand ils le font, c'est pour faire entendre une jolie mélodie qui signifie « Chinga tu madre, buey ».1 Ce n'est que quand il fait très chaud qu'ils s'énervent un peu. Sûrement parce qu'ils sont pressés d'aller boire une bonne bière.

D'après Mario, on circule de plus en plus mal à Mexico, malgré le fait que certaines voies sont maintenant à deux étages. Il nous montre des travaux qui n'en finissent pas à un échangeur qui s'est affaissé, car la ville est construite sur une ancienne lagune et le terrain y est très meuble.

Le plan « No circula » qui se déclenche quand le taux de pollution devient dangereux oblige les voitures à rester au garage deux jours par semaine, en fonction du dernier chiffre de leur plaque d'immatriculation. Mais les riches ont plusieurs voitures pour pouvoir circuler tous les jours.

Mario se plaint aussi du prix de l'essence qui n'arrête pas d'augmenter. Quand on lui apprend qu'en France le litre de super coûte exactement le double, il a du mal à le croire :
« Comment les gens font-ils alors ? »

La concurrence des véhicules UBER ? Elle ne l'inquiète pas trop.
Car les patrons obligent les chauffeurs à faire 12 « services » par jour s'ils veulent être payés 2500 pesos (125 euros) par semaine. S'ils en font moins, ils ne reçoivent que 1500 pesos (75 euros). Donc, peu à peu, ils vont disparaître.

Finalement, il a l'air heureux de son sort, Mario. Il circule en voiture alors que d'autres le font à pied, en bus et en métro. Il est bien habillé, il discute avec ses clients, il se sent utile, et même si ses revenus sont faibles, il gagne assez pour nourrir sa famille. Que demander de plus ?!


1 Oui, c'est ça, vous avez bien compris.

                                                                                   François Lassabe

domingo, 7 de agosto de 2016

MADRID: Sinouj: Indica


Un des meilleurs groupes actuels de jazz contemporain ethnique. Un mariage réussi entre le jazz, le rock et les rythmes et sonorités du bassin méditerranéen.

viernes, 5 de agosto de 2016

GALICE: VERÓNICA FERREIRO - LAIO feat. MOISÉS SÁNCHEZ IV Festival de Jazz Escale...


Verónica Ferreiro est une jeune chanteuse et compositrice galicienne issue d'une famille de musiciens. En 2004, la Xunta de Galicia lui a décerné le prix de la meilleure interprète de Galice. Et elle est partie à Madrid, avec une bourse, pour étudier la musique. Pendant 5 ans, elle s'est formée avec les meilleurs musiciens de jazz nationaux. Et grâce à sa polyvalence, elle a commencé à travailler en tournée comme choriste et danseuse pour les meilleurs producteurs et artistes du pays. Depuis 2008, elle a sa propre formation et elle participe à de nombreux festivals de jazz en Espagne.

jueves, 4 de agosto de 2016

MEXICO: L'OISEAU BLEU

L'OISEAU BLEU

Juillet 2016

10h30 . Ligne de métro Tasqueña – Cuatro Caminos.
L'heure de pointe est passée, les trains ne sont plus bondés et les policiers n'ont pas eu à séparer, dans des wagons différents, les hommes des femmes et des enfants. À la station Xola, un premier vendeur ambulant fait son apparition :
« Bonjour messieurs les passagers, permettez-moi de vous présenter un produit unique : ce coupe-ongles avec diamant incorporé vous permet de réparer les ongles cassés, les ongles incarnés ; grâce à lui, vous aurez des mains impeccables qui feront l'envie de vos collègues de travail. Ce produit unique vous le trouverez dans les grandes surfaces au prix de 50 pesos.1 Moi, exceptionnellement aujourd'hui, je vous l'offre pour 10 pesos.2
Oui, vous avez bien entendu, il ne vous en coûtera que 10 pesos, n'hésitez pas. »
Malgré ces arguments convaincants, aucun passager ne se manifeste. Le vendeur change de wagon à la station suivante et laisse la place à une ambiance musicale tropicale, digne d'une discothèque ou d'un restaurant de plage d'Acapulco. Car le marchand suivant a son propre mini « sound system » attaché à la ceinture :
« Excusez-moi de vous déranger, mesdames et messieurs. Le CD que je vous propose, comme vous pouvez l'écouter, est d'une qualité incomparable. Il contient les 80 plus grands succès de musique tropicale, salsa, latin jazz, cumbia, reggaeton, interprétés par les plus grands artistes de notre continent. Un CD indispensable pour vos fêtes, anniversaires, mariage, ou simplement pour être de bonne humeur dès le matin. Ce disque incomparable ne vous coûte que 10 pesos, 10 petits pesos seulement. »
Aucun passager ne réagit car ils savent que ce sont des morceaux que l'on peut pirater facilement sur internet. À l'arrêt suivant, le DJ ambulant ressort bredouille.

Station San Antonio Abad. Le troisième camelot veut prendre soin de notre santé :
« Avec votre permission, messieurs les passagers, je vais vous présenter un livre de 100 recettes de cuisine qui vous permettra de mieux nourrir votre famille, d'être en meilleure santé et de vivre plus longtemps. Car toutes ces recettes sont préparées avec des produits naturels. Par exemple, dans le chapitre Salades, vous trouverez la salade au poulet, la salade aux champignons, la salade de piments, la salade méditerranéenne, la salade au maïs, la salade à l'avocat...
Dix pesos seulement pour ce petit livre qui va changer votre vie. »
Deux passagères achètent, convaincues de l'utilité de la brochure. Avec les 20 pesos en poche, le vendeur pourra s'offrir un soda bien sucré et coloré, et un petit sachet de chips pimentées. Pour tenir le coup, car il a dû se lever très tôt pour arriver au terminus Tasqueña depuis sa banlieue misérable.

Station Pino Suárez. Juste avant la fermeture des portes, elle s'engouffre dans le wagon puis pivote sur elle-même les bras écartés pour délimiter son espace scénique et ne pas disparaître dans la forêt de bras et de jambes. C'est une brunette au regard pétillant qui doit avoir une vingtaine d'années. Sans attendre, elle déclame un poème avec tant de force et de talent que tout le monde tend l'oreille, même ceux qui font semblant d'être ailleurs :
« Hay un pájaro azul en mi corazón que quiere salir pero soy dura con él, le digo quédate ahí dentro, no voy a permitir que nadie te vea. »3

Ces vers, il semblerait qu'elle les a elle-même écrits, car ils reflètent l'état d'âme de tous ces chilangos4 du peuple qui passent des heures, chaque jour, dans les transports publics, pour aller gagner leur vie dans les quartiers plus riches. Épuisés par des journées interminables, la pollution et l'altitude, ils se renferment sur eux-mêmes et n'expriment plus aucun sentiment en public.
En réalité, elle récite le poème L'oiseau bleu (Bluebird, 1992) de l'américain Charles Bukowski. A la fin du récit, une passagère, émue, applaudit timidement. Les autres ne bronchent pas. La brunette s'adresse alors à eux :
« Pour me remercier, je vous demande simplement un regard, un sourire, pas forcément de l'argent, mais surtout pas d'indifférence, car, vous savez, l'indifférence c'est l'antichambre de la mort. »
Quelques pesos tombent dans sa main et, en échange, elle sort de son petit sac à dos des marque-pages qu'elle a décorés. Car elle ne veut surtout pas qu'on la prenne pour une mendiante. En trois minutes, entre deux stations, un rayon de soleil a éclairé la grisaille quotidienne.

Station Zócalo. Des couloirs interminables, un escalier roulant, et au dessus de la sortie, un grand panneau sur lequel on peut lire : La vente ambulante est interdite dans le métro.


                                                                                                                            François Lassabe

1 2,50 euros
2 0,50 euro
3 Il y a dans mon cœur un oiseau bleu qui veut sortir mais je suis trop coriace pour lui, je lui dis, reste là, je ne veux pas qu'on te voie.
4 Habitants de la capitale